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4 mai 2011 3 04 /05 /mai /2011 00:16

ACTE I : ÇA A COMMENCÉ COMME ÇA

A la fin de chaque scène, on entend des bruits d’assiettes cassées au même instant les personnages se figent.

 

intro : le premier jour

Au loin

Salomé : Papa, papa, j’ai fait un cauchemar.

Mère : Marion va te recoucher, on est fatigué.

Père : Ce n’est rien ; j’y vais moi.

 

A nous

Marion :

Et le père monta dans sa chambre.

Quel âge lui donneriez-vous à cette enfant ? 9-10 ans, peut-être 11. En réalité Salomé avait 13 ans cette nuit-là, la première fois. Et elle m'a avoué son grand secret à 15, deux ans trop tard.

Vous devinez ce qui lui est arrivé n’est-ce pas ?

Moi aussi quand mon amie m'a dit son grand secret, j’étais excitée de le deviner. On éprouve toujours ce « malin plaisir » à être le premier à comprendre la fin de l’histoire. Je devinais avant même qu’elle ne le dise, je retrouvais les mots qu’elle n’osait pas dire. Et il y avait quelque chose de diabolique à jouir de ce secret. Je goûtais mon pouvoir. Je saurais la comprendre.

Je comprenais et j’en éprouvais de l’orgueil, je n’étais pas si naïve moi à 15 ans. A mesure qu'elle rentrait dans son passé, qu’elle redevenait devant moi l’enfant qui s’était laissée faire, moi je grandissais.

De son secret encore caché, elle m’avait dit depuis longtemps déjà « je crois que c’est ma faute ». D’octobre à mars, elle avait retenu ce secret, tout en me disant qu’elle en avait un et que c'était sa faute. Seuls ces mots s’échappaient : « je crois que c’est ma faute ». Ça aurait mis la puce à l’oreille de n’importe qui, "c'est ma faute", mais j’avais quinze ans. Au contraire, quand tout était enfin dit, ou plutôt quand il fut admis que j’avais bien compris, ce sont ces mots-là, « je crois que c’est ma faute », qui m’ont choquée : bien sûr que ce n’est pas ta faute, c’est bien connu, j’étais en colère, tous les gens le savent, c’est écrit dans les livres.

Nous les sages, nous savons que c’est mal.

Et elle, elle redevenait enfant. Le mal ne lui était pas si distinct.

Moi j’étais horrifiée, mais j’avais enfin un rôle. Et ce jour-là a fixé pour toujours les lois de notre relation. Elle serait l’enfant qui a besoin de moi : je lui dirais où est le bien, où est le mal, et d’où il risque de surgir. Elle me demanderait conseil à chaque tournant. Elle serait suppliante, sans défense, et je serais son guide.

J’ai grandi ce jour-là, mais je me suis aussi effacée pour toujours.

C’est moi qui lui donnerais tout inconditionnellement ; c’est moi qui l’aimerais au point de disparaître. Elle n’aurait pas su aimer ainsi. Il faudrait donc aimer pour deux. Pour la guider, il faudrait rester derrière elle, toujours prête à la rattraper. Il n’y aurait de place pour rien d’autre. Elle, l’enfant, elle vivrait.

Pourtant je vous vois déjà offusqués, comment pourrais-je me plaindre ? Comment puis-je oser ? C’est exactement ça, vous avez tout compris, depuis ce jour-là je n’ai plus eu ni le droit de me plaindre, ni celui d’agir. C’est moi qui l’ai suivie dans ses débauches.

Mais c’est son histoire à elle que je vais raconter, ne vous inquiétez pas.

Vous êtes dans le secret maintenant, je vous entraîne avec moi, taisez-vous, vous n’avez plus le droit qu’à ça, à vous taire et à la regarder se perdre.

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commentaires

V
<br /> Merci de cet article dans ma communauté.<br /> Bisous<br /> Violette<br /> <br /> <br />
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